Police et racisme

Y a-t-il un lien entre le meurtre de George Floyd et celui d’Adama Traoré par un policier ? Oui, incontestablement, puisqu’il s’agit d’un crime raciste et le racisme n’a pas de frontière.
Mais si on remplace le mot policier par le mot police, la réponse est bien plus complexe. Car d’une part il ne s’agit pas de la même police puisqu’il ne s’agit pas du même Etat. D’autre part les USA sont constitués de 50 Etats ayant chacun leur gestion particulière de la police. Et il y a bien des Etats dont le racisme reste endémique et dont la police est fortement empreinte et même encouragée en ce sens par une forme d’immunité. Ce qui est différent normalement de la police fédérale lorsqu’ un gouvernement fédéral luttant contre le racisme la gère efficacement comme cela a été le cas dans l’histoire. Mais lorsque ce gouvernement fédéral a à sa tête un Trump, c’est la porte ouverte à toutes les possibles exactions dans l’ensemble des Etats.
Est-ce que ce qui se passe en France est comparable à ce qui se passe aux USA ? On aimerait répondre non, compte-tenu de nos institutions républicaines et du fait qu’un citoyen français n’est pas légalement identifiable par son apparence physique, sa religion, ou son appartenance quelle qu’elle soit contrairement aux Américains basés sur la forme du communautarisme.
Et pourtant, il n’y a pas un jour où n’est rapportée quelque exaction commise au sein de la police française, contrôles au faciès, tutoiement des « non-blancs », voire violence sur les individus sans raison valable. Est-ce la police républicaine qu’il faut incriminer ou sa gestion politique ?
De mon point de vue la responsabilité est celle du politique. Et elle l’est à bien des niveaux dont la police n’est que le bras armé. Tout d’abord la gestion catastrophique des banlieues dont certaines parties deviennent des ghettos et qu’on appelle perversement « espaces de non-droit ». Ghettos qui comme Martin Luther King l’a démontré aux USA sont des espaces où germe et se fomente le racisme. Elle l’est dans l’encouragement des combats identitaires qui sont alimentés par les non-réponses républicaines aux demandes d’égalité face au travail, au logement, à l’école, à la culture etc. Dans les manipulations idéologiques du mot identité comme notamment la notion d’identité française. Dans la non-reconnaissance d’une histoire coloniale dont les peaux payent encore l’impôt de la couleur. Il est facile de dire que c’est du passé révolu. Mais l’histoire est prégnante et se sédimente dans les consciences. Ce qui est valable d’un point de vue freudien pour les névroses individuelles l’est également pour les névroses d’une nation. Tant qu’on n’a pas de mots pour le dire et d’actes pour le déconstruire, le mal persiste et ronge.
Non, nous ne sommes pas américains, non la police française n’est pas américaine. MAIS, la France a une lourde tendance à se rapprocher du modèle américain (ghettos, communautés, inégalités endémiques, économie tendant vers l’ultra libéralisme etc. Même la tenue des policiers tend à ressembler à leur tenue, et les gars de la BAC s’habillent et se comportent comme des Starsky et Hutch). La France et sa police entre floue dans « la machine à rêves » du cinéma américain, dans l’image bien nette de l’idéologie américaine, un peu comme Woody Allen se constatait flou dans une scène très nette.
Ainsi nous nous éloignons, et notre police avec, de notre idéal républicain.
Nous sommes donc fondés, comme Martin Luther King l’avait fait, de demander à l’Etat de se réconcilier avec l’idéal républicain qui a fondé notre nation française. Et ainsi par le travail d’éducation, de culture, de vraie justice, contenir au mieux possible les actes des voyous qui se travestissent en portant les tenues de notre police républicaine.

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