Patrick Weil et la diversité

Dans quelques jours, je publie deux ouvrages: le premier, un essai intitulé NOIR ou de l’administration de la couleur de Toussaint Louverture à Barack Obama (chez Galaade), le second un album pour la jeunesse intitulé Marianne et le mystère de l’Assemblée Nationale (coédition Gallimard/jeunesse et Assemblée nationale). Le premier pose les questions concernant la République et la démocratie française dans sa relation avec les gens dits de couleur, le second a pour objet d’offrir au jeune publique sous la forme d’une histoire fantastique, une compréhension claire du fonctionnement et de l’esprit qui anime notre Assemblée nationale. Les deux ouvrages mettent en valeur l’esprit de la République et le fonctionnement de notre démocratie et donc cet esprit des lois qui fondent notre mode de vivre ensemble. Je vous en parlerai plus longuement.

Alors, Alain Foix se met-il à faire de la politique? Non, si on entend par cela l’engagement dans un parti quel qu’il soit. Oui, et j’en ai toujours fait autant dans ma vie professionnelle, civile, littéraire et artistique en tant que citoyen impliqué dans la vie de sa société. En ceci, je souscris tout à fait à la position de Patrick Weil qui, dans un article de Libération paru ce jour, explique pourquoi il refuse de participer au Comité de la diversité. Une belle attitude politique de quelqu’un qui n’est pas un politique mais un citoyen responsable et conséquent quant à la cohérence entre sa pensée et ses actes. Penser c’est agir, écrire c’est agir. Alors oui, l’artiste, l’homme de lettre, le philosophe, le sociologue ou le scientifique sont des hommes politiques dans la mesure où toute action est engagement. Voici donc reproduit ici l’article de Patrick Weil sous la couverture de mon livre racontant un nouvel épisode des aventures citoyennes de ma petite Marianne.couvbassequalite

Patrick Weil: « pourquoi je refuse de participer au Comité sur la diversité »

Comment participer à un comité chargé de lutter contre les discriminations, alors que ce même comité a été nommé par un gouvernement qui mène une politique discriminatoire à un niveau jamais atteint depuis la deuxième guerre mondiale? C’est pour cette raison notamment que Patrick Weil, directeur de recherche au CNRS et historien de l’immigration, a refusé la proposition de Yazid Sabeg, commissaire à la diversité et à l’égalité des chances, de participer à son Comité pour la mesure et l’évaluation des discriminations et de la diversité.

Monsieur le Commissaire,
J’ai bien reçu votre invitation à participer à un «comité pour la mesure et l’évaluation des discriminations Rtr5rre_comp_2 et de la diversité» et vous en remercie.

J’ai toujours pensé que pour un chercheur, accepter de faire partie d’un comité, d’une commission nommée par le pouvoir politique, c’était faire de la politique. En faire avec la formation et l’information du scientifique, mais en faire tout de même puisqu’il s’agit de faire des propositions politiques ce qui implique, non pas un accord complet, mais un minimum d’accord avec le cadre général de la politique suivie dans le domaine de la mission ou de la commission.

Or dans des domaines qui sont particulièrement de ma compétence, ceux de l’immigration et de la nationalité, qui ne sont pas étrangers à la mission de votre commissariat, le gouvernement qui a vous a nommé mène une politique discrètement et objectivement discriminatoire, à un niveau jamais atteint depuis la Seconde Guerre mondiale, sous l’impulsion d’un ministère de l’immigration et de l’identité nationale, inédit dans notre histoire politique.

Je ne me vois pas travailler aux outils de la lutte contre la discrimination dans le cadre d’une commission nommée par vous, pendant que les naturalisations et l’accès à la nationalité par mariage, le regroupement des conjoints de Français, pour ne citer que quelques exemples, continueront de s’effectuer de façons de plus en plus discrétionnaire et discriminatoire.

Je ne saisis pas non plus très bien l’objectif de cette commission et il m’inquiète même pour le moins. S’agit-il mettre en oeuvre une politique de lutte contre les discriminations en raison de l’origine réelle ou supposée? Si c’est le cas, les instruments existent, ils ont été rappelés clairement par la commission présidée parMadame Simone Veil dont j’approuve l’excellent rapport.

Au mois de juin dernier Patrick Simon et moi-même rappelions que dans le cadre constitutionnel existant, une meilleure connaissance des nationalités et lieux de naissance des ascendants, croisée avec des données socioprofessionnelles permettraient dans les statistiques publiques et au niveau des grandes entreprises privées de mieux approcher les phénomènes discriminatoires et d’ainsi mieux les combattre.

De façon ponctuelle, pour permettre notamment de relier les informations recueillies à partir de ces données objectives à la perception ou la réalité des discriminations, sur échantillon anonyme et sous le contrôle de la CNIL, des enquêtes conduites par la statistique publique pourraient contenir des questions faisant référence à la religion, aux origines ou à la couleur de la peau.

Mesurer la diversité dans la société française est un objectif différent, qui ne me paraît ni prioritaire ni de même de la compétence légitime des pouvoirs publics,contraire en réalité à l’article 1 de notre Constitution.

Pour toutes ces raisons, je ne peux accepter votre proposition.

Je vous prie d’agréer, Monsieur le Commissaire, l’expression de mes sentiments les meilleurs.
Patrick Weil

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