Glasgow sur scène

Glasgow (bridge)

Les artistes sont sans doute les meilleurs ambassadeurs de leur pays, pour autant qu’ils s’expriment en toute liberté.

Les rencontres organisées par l’IETM (Informal European Theater Meeting) ou par FENCE, réseau d’auteurs auquel j’appartiens, ont pour objet de créer des ponts enjambant les frontières culturelles, politiques, sociales, afin que les individus porteurs de leurs horizons dialoguent, se questionnent, communiquent des informations pouvant aider non seulement à la production et à la diffusion (c’est l’aspect marché) mais aussi à la réflexion sur son propre travail, le cadre de sa créativité, et à la compréhension de l’autre, une meilleure appréciation de son horizon esthétique.

Dire des artistes qu’ils sont des ambassadeurs pourrait être reçu au mieux comme un poncif dont le danger réside dans la légèreté d’une telle affirmation qui pourtant porte à conséquence, au pire comme un postulat qui du point de vue du politique fait des artistes leurs vassaux et de l’art un objet de marchandisation et un outil politique (deux dimensions que l’on retrouve dans la notion de « vitrine culturelle à l’étranger»). Il est donc clair qu’il faut porter une attention toute particulière à la deuxième partie de la proposition : « pour autant qu’ils s’expriment en toute liberté ».

Un artiste est d’abord un citoyen et un individu qui exprime un point de vue personnel. Ce point de vue est forcément le produit d’une analyse critique. Critique au sens de réflexion distanciée prenant en compte les paramètres d’une situation, d’un événement. Il n’y a pas meilleure manière de comprendre un pays qu’à travers le regard critique d’un de ses ressortissants. L’artiste est un être social et l’art dont il est porteur porte en lui l’essence même d’une dimension de la société. L’art n’est pas nécessairement en soi social mais il exprime une relation au social et questionne en ceci la cité.

Rien de plus européen donc que ces meetings d’artistes européens qui, à leur manière construisent une Europe faite d’individualités, de diversités, et de volonté de mouvement vers l’autre.

Ces rencontres FENCE, les douzièmes du nom, organisées à Glasgow dans le cadre de l’IETM, par  le Playwrights’ Studio of Scotland dirigé par la charmante et dynamique Julie Ellen, fut comme les précédentes, passionnantes. Il fut question d’identités et de séparation artificielle des nations. Des Tchèques et des Slovaques, nous ont parlé de leur ancien pays commun : la Tchécoslovaquie. L’Afrique aussi était présente et on entendit parler de néocolonialisme dans la manière dont est organisée la diffusion européenne des œuvres et des artistes africains. Nous nous sommes lu, comme d’habitude, nous nous sommes traduits, nous avons bu et dansé et partagé nos rires et, pour certains nous nous sommes donnés rendez-vous en Guadeloupe dans une semaine et pour d’autres à Stockholm au début du printemps prochain.

Alors ne pas croire que la pluie écossaise sur Glasgow soit porteuse de frimas et de claquements de dents. Elle est comme la douche du même nom. Elle cache entre ses gouttes une chaleur étonnante…

Laisser un commentaire